Les schémas
Au delà des frontières de l’entreprise : modèle fermé et modèle ouvert (d’après Chesbrough 2004)
Définition des principaux concepts
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Pour Henry Chesbrough les entreprises ne peuvent plus innover seules, voir Chesbrough (2011, page 35):
- les connaissances à l’origine d’une innovation peuvent provenir aussi bien de sources internes que externes et les débouchés peuvent s’envisager à l’intérieur comme à l’extérieur des frontières de l’entreprise;
- l’ouverture est un moyen permettant aux entreprises d’optimiser leur processus d’innovation et d’exploiter de nouveaux Business models ouverts (voir Stratégies de rupture et innovation), notamment pour les entreprises leaders sur les marchés des hautes technologies (voir Leroux et al. 2014).
L’Innovation Ouverte dans un réseau inter-organisationnel est devenue un champ de recherche : voir Gassmann, Enkel, Chesbrough (2010), voir l’état de l’art proposé par E. Huizingh (2011) et voir l’ouvrage LEADING OPEN INNOVATION (2013). Pour comprendre pourquoi l’Open Innovation est certes une pratique ancienne, mais qui doit etre repensée, voir Manceau et al. (2012), voir ce dossier de LesLibresBlancs.fr qui liste sept livres blancs à télécharger et voir cette vidéo de T. Loilier et A. Tellier.
1. Les trois processus d’Open innovation
H. Chesbrough met en évidence trois processus possibles de création de nouvelles connaissances dans l’Open Innovation :
- le processus dit Inside-Out, ou innovation sortante, définit comment une entreprise peut valoriser ses propres connaissances dans un réseau : soit classiquement par la cession (gestion de nombreux brevets dormants, transferts de technologies, pratiques d’essaimage ou spin-off…), soit en révélant aux autres certaines de ses connaissances ou de ses données (notamment pour chercher à imposer sur le marché un standard technologique qu’elle restera seule à maîtriser);
- le processus dit Outside-In, ou innovation entrante, définit comment une entreprise peut, à l’inverse, enrichir sa base de connaissances grâce au réseau : soit classiquement par acquisition (brevets, licences, transferts, joint-ventures…), soit par le développement de nouvelles formes de collaborations (inter-entreprises, mais aussi avec des utilisateurs) ;
- enfin et surtout, le processus dit Couplé, associant les deux premiers dans une véritable logique collaborative de mise en commun et de co-création dans un réseau : co-conception, codéveloppements, projets conjoints, alliances, participations à des consortiums, coopérations en recherche… et liant donc des connaissances tacites et explicites. C’est un tel processus qui a fait le succès de l’Open Source et il s’agit ici de l’utiliser au profit d’un réseau: voir les dossiers de Dartiguepeyrou 2012, voir Pénin 2013 et voir Théorie des écosystèmes d’affaires.
2. Quatre types de connaissances
Quatre types de connaissances peuvent ainsi s’intégrer par la collaboration dans un réseau :
- les connaissances qui sont antérieures à la collaboration, background knowledge ;
- les connaissances qui sont le fruit immédiat de la collaboration, foreground knowledge ;
- les connaissances parallèles, développements connexes qui sont créés en interne par chacun des membres du réseau, sideground knowledge ;
- et les connaissances futures qui seront nées de la collaboration, post-ground knowledge.
3. Ouvert mais pas gratuit : l’Open Innovation est liée à l’Open Data
Dans l’Open Innovation les données ne restent qu’« entrouvertes », car elles sont souvent stratégiques. Ce que propose Twitter ou Facebook, par exemple, ce n’est pas de vendre des données mais bien d’en « ouvrir » certaines. Mais il s’agit quand même de garder le pouvoir par la maîtrise totale de l’API d’accès à ces données (et par exemple de pouvoir modifier les règles de cette API sans préavis).
Autre exemple : si l’API de la SNCF lui permet de tarifer ses données « ouvertes » selon différents niveaux d’usage, c’est dans certains cas pour favoriser l’innovation ouverte autour de start-up locales, mais c’est aussi pour pouvoir se protéger des grandes plateformes qui pourraient facilement utiliser les données SNCF pour offrir des services de vente de billets (l’hôtellerie ou les compagnies aériennes ont ainsi perdu perdu la maitrise de leur relation client), voir sur le Blog recommandé de Simon Chignard.
4. Open Innovation et stratégie : DPI, les droits de propriété intellectuelle
L’Open Innovation concerne bien sûr la fonction R&D (avec notamment le rôle que peuvent jouer les Lead-users pionniers), mais aussi la fonction Marketing (avec le rôle que jouent les consommateurs dans la co-création de valeur, voir Leclercq at al. 2016) et la fonction R.H. (car personne ne peut aujourd’hui prétendre avoir en interne tous les « meilleurs talents« ).
Mais Open innovation et Open data ont surtout une dimension stratégique par la possibilité d’une nouvelle gestion très fine des droits de propriété intellectuelle DPI : voir Viseur 2016, voir ce dossier Internetactu.fr, voir le Blog X-Propriété intellectuelle et voir cette vidéo de J. Pénin sur collaboration et propriété intellectuelle.
Pour une discussion sur ces stratégies d’Open-innovation:
- voir la page Stratégies de rupture et Business models sur le concept d’innovation disruptive;
- voir Isckia et Lescop (2011) sur les situations de coopération/compétition pour se protéger des innovations de rupture sur des marchés à maturité,
- voir Badillo (2013) sur les liens entre Open Innovation et Lead-users;
- voir Maric, Rodhain et Barlette (2015) sur les liens entre Open Innovation et Innovation responsable;
- voir Battista Dagnino, Le Roy et Yami (2007) sur les phénomènes conjoints et/ou successifs de coopération et de compétition : les stratégies de coopétition;
- et voir cette vidéo de F. Le Roy sur les stratégies de coopétition.
Au final on trouvera, dans cet appel à contributions pour la revue Innovations (2019), une liste de nombreuses questions (et de références) sur les pratiques organisationnelles et managériales de l’Open innovation.
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Voir les autres théories utilisées dans le développement des SI
Voir la carte générale des théories en management des S.I.
RÉFÉRENCES
Chesbrough H.(2011) The era of Open Innovation, page 35-41, in « Top 10 Lessons on the New Business of Innovation », Sloan Management Review
Voir à la page 35 du Pdf
Gassmann O., Enkel E., Chesbrough H. (2010), The future of Open Innovation, R&D Management
Incontournable : le numéro « spécial Open innovation », de la revue Innovations (2012 n°39) avec 9 contributions :
et l’ouvrage LEADING OPEN INNOVATION (2013), Huff, Möslein et Reichwald (eds), avec 16 contributions importantes, sur Books.Google
Isckia T., Lescop D. (2011), Une analyse critique des fondements de l’innovation ouverte, Revue française de gestion, 2011/1 n° 210
Pénin J. (2013), L’innovation ouverte : définition, pratiques et perspectives, CCI Paris Ile-de-France
Dartiguepeyrou C. (2012), L’entreprise « ouverte » : les nouveaux modes d’organisation à l’ère numérique, Fondation Télécom, Institut Mines-Télécom, Edition Uniqueness
Manceau, D., Fabbri, J., Moatti, V., Kaltenbach, P. & Bagger-Hansen, L. (2012). L’open innovation ouvre à de nouvelles pratiques. L’Expansion Management Review, 144,(1)
Leroux I., Muller P., Plottu B., Widehem C. (2014), Innovation ouverte et évolution des business models dans les pôles de compétitivité, Revue d’économie industrielle n°146
T. Leclercq, W. Hammedi, I. Porcin (2016), Dix ans de co-création de valeur: une revue intégrative, Recherche et Applications en Marketing, 1-38
J. Maric, F. Rodhain, Y. Barlette (2015), Open and Responsible Innovation Concepts for Competitive Advantage, MCIS Proceedings. 19
G. Battista Dagnino., F. Le Roy, S. Yami (2007). La dynamique des stratégies de coopétition, Revue française de gestion, 176, (7)
P-Y Badillo (2013), Les théories de l’innovation revisitées : une lecture communicationnelle et interdisciplinaire de l’innovation – Du modèle « émetteur » au modèle communicationnelle. Les Enjeux de l’Information et de la Communication, vol 1, n° 14
R. Viseur (2016), Problèmes pratiques de propriété intellectuelle : bases d’un cadre légal adapté aux activités co-créatives, Congrès AIM